05 Sep se laisser toucher par le Christ
(Homélie du 5 septembre- Mc 7, 31-37)
Comment comprendre les signes et les miracles que Jésus accomplit?
Comment comprendre les signes et les miracles que Jésus accomplit dans les villages et les endroits où il passe ?
Pour nous qui écoutons ces récits 2000 ans après, qui connaissons la suite de l’évangile : la manière dont Jésus va accepter de se laisser arrêter, être mis à mort et ressusciter, c’est relativement facile à comprendre parce que nous en avons les clés d’interprétation.
Mais à l’époque de Jésus, pour les disciples qui n’ont pas encore compris la manière dont Jésus va faire venir le Royaume de Dieu ça n’est pas évident, d’autant que la plupart des gens attendaient un messie politique, dont les prodiges allaient permettre de restaurer le Royaume d’Israël.
Ce que les disciples avaient compris…
Jésus a déjà fait le signe d’une première multiplication des pains ainsi que de nombreuses guérisons, les gens ont été impressionnés, mais ils n’ont pas bien compris l’ampleur et le sens profond de ce signe, c’est-à-dire que Jésus est venu apporter le salut au peuple d’Israël.
- La plupart y ont vu un prodige accomplit par un homme au nom de Dieu, mais pas une manifestation de Dieu lui-même à travers Jésus.
- Une discussion avec les pharisiens montre que les chefs religieux sont encore très centrés sur les rites extérieurs et les règles de pureté et peu capables d’accueillir le message de Jésus, qui lui est centré sur l’intériorité.
- Même les apôtres n’ont pas bien compris encore qui était vraiment Jésus : l’évangile nous dit : « En effet ils n’avaient rien compris à l’affaire des pains, leur cœur était endurci. » Pour les apôtres, Jésus est un messie guérisseur, mais ils ne voient pas encore ce que cela va impliquer pour eux et pour le salut du peuple d’Israël.
Alors, Jésus les emmène en territoire païen, un peu à l’écart. Il ne cherche pas à attirer les foules, mais à faire réfléchir ses disciples sur le sens de sa mission.
Ce que Jésus les invite à comprendre…
Lorsqu’on lui amène un sourd-muet Jésus le prend à l’écart et le guérit.
Cette guérison n’est pas tout à fait comme les autres, elle est accomplie en petit comité, devant ses disciples, de manière très détaillée, geste après geste, comme si Jésus voulait par-là, révéler de manière très pédagogique, quelque chose sur sa propre nature divine.
Les disciples ont pu comprendre au moins trois choses :
- Premièrement, Jésus vient confirmer qu’il est le Messie annoncé par Isaïe, en accomplissant la parole que nous avons entendue en 1ère lecture : « Dieu vient lui-même et va vous sauver, alors s’ouvriront les oreilles des sourds… ». C’est Dieu lui-même qui vient sauver…
- Ensuite Jésus pose trois gestes pour opérer cette guérison :
- le toucher : le doigt, comme la main de Dieu, évoque dans la Bible la création du monde et la protection du peuple : Jésus manifeste la force créatrice du Père qui habite en lui),
- la salive évoque la vie intérieure et intime du Christ : lui qui est le Verbe de Dieu, se donne lui-même, de sorte que l’intimité de cette Parole habite notre propre intimité
- Le souffle évoque l’Esprit-Saint et la vie insufflée en l’homme à la création.
A travers lui, Dieu recrée, partage son intimité et insuffle son Esprit à ceux et celles qui acceptent de la recevoir.
Jésus essaie de faire comprendre aux apôtres qu’il est Dieu lui-même venu visiter son peuple, à travers les signes qu’il pose.
- Jésus invite aussi les disciples à se laisser toucher intérieurement par cette guérison : eux aussi ont des yeux qui ne voient pas et des oreilles qui n’entendent pas. Ils doivent comprendre qui est Jésus et ce qu’il vient révéler : pas seulement un messie guérisseur, mais Dieu lui-même qui vient porter le salut au peuple.
Ce que Jésus nous invite à comprendre aujourd’hui
Ce passage nous ouvre une réflexion dans trois domaines :
- Une réflexion sur ce que nous écoutons et sur ce que nous disons : dans quelle mesure notre écoute et notre parole sont-elles au service de Dieu ?
- Quel temps prenons-nous explicitement pour nous mettre à l’écoute de la Parole de Dieu ?
- Quelles sont ces éventuelles fermetures à sa parole que le Christ veut venir guérir ?
- Comment notre Parole est-elle une parole touchée par le Christ qui habite en nous ?
Le mot grec utilisé dans l’évangile pour « parler correctement », c’est orthôs, (comme dans orthodoxie, orthophonie, orthopédie, etc.) c’est-à-dire de manière droite, ajustée. Une invitation à laisser progressivement le Christ ajuster notre parole à la sienne, après avoir intériorisée sa propre parole.
- En reprenant le doigt, la salive et le souffle, nous pouvons avoir une réflexion plus générale sur la manière dont nous nous laissons en permanence recréer par le Christ au niveau de notre corps et de notre rapport à la création, comment nous laissons le Christ habiter notre intimité, comment nous accueillons le souffle de l’Esprit qu’il veut nous partager.
- Une réflexion sur les gestes habituels que nous posons lors des prières : signe de la croix, évangile, mea culpa, lavabo, signe de paix… comment les laissons-nous être habités par le Christ ? Prenons par exemple juste le geste juste avant d’écouter l’évangile… comment laissons-nous vraiment ce geste ouvrir notre intelligence, notre parole et notre cœur à sa Parole.