18 Fév Dire du bien
Nous étions quatre à être invités à dîner ce soir-là chez Pierre et son épouse. C’est la première fois que je les rencontrais. J’étais venu avec leur nièce, une bonne amie, qu’ils n’avaient pas vue depuis plusieurs années. Pierre avait cette faculté de mettre chacun à l’aise et surtout d’écouter l’histoire de chacun avec une telle attention et unetelle capacité d’émerveillement, qu’à la fin du dîner, chacun s’est senti valorisé et qu’une complicité a pu naître entre nous, tant nous avions l’impression d’apporter solidairement, chacun à notre manière, une pierre à l’édification de la société.
Le soir, en relisant cette soirée dans la prière, le Seigneur m’a fait comprendre que c’était ça mon rôle de chrétien et de prêtre : dire du bien, mettre en valeur le parcours de chacun, ni par démagogie, ni par naïveté, ni par politesse… mais simplement parce que c’est la meilleure manière d’être signe de l’amour de Dieu, et de permettre aux autres de repérer les dons que Dieu permet de faire germer dans leur vie.
Il arrive qu’au confessionnal j’entende des personnes s’accuser d’avoir dit du mal des autres, (et j’avoue qu’il m’arrive aussi parfois de le confesser), et cela m’a amené à réaliser que l’on n’’insistait sans doute pas assez sur cette belle mission qui est la nôtre de dire du bien, de bénir.
La bénédiction (bene-dictio= parole de bien) dans la Bible est d’abord un don de la vie que Dieu offre à l’être humain : Dieu bénit l’homme et la femme (Gn 1,28) pour qu’ils portent du fruit et soient féconds, il bénit les semailles pour qu’elles portent du fruit (Ps 64,11), il bénit le travail pour qu’il engendre les richesses (Jb 1,10). Il nous a bénis dans le Christ (Eph 1,3), grâce à l’Esprit Saint qu’il met en nos cœurs pour faire de nous des Fils de Dieu (Rm 8, 15-16).
Quand Dieu bénit, il donne la vie et quand, à sa suite et en son nom, nous disons du bien d’une personne (à elle- même ou à une autre), nous contribuons à mettre en valeur la vie de Dieu chez cette personne.
Évidemment il ne s’agit pas de dire du bien de manière factice ou purement formelle, mais en le pensant vraiment, c’est-à-dire en ayant pris le temps de contempler au préalable combien une personne, parfois si différente de nous dans sa personnalité et dans son parcours, peut, à sa manière, collaborer à l’œuvre de Dieu et nous en émerveiller.
Dire du bien d’une personne qui ne nous est pas spécialement proche, peut parfois être le fruit d’un petit travail de décentrement de soi ou de lutte contre un petit sentiment de jalousie : c’est toujours bon pour la progression de notre vie spirituelle.
Dire du bien d’une personne, c’est ne pas la réduire à ses limites visibles, mais chercher en quoi cette personne est aussi aimée de Dieu.
Dire d’une bien d’une personne c’est ouvrir un chemin de collaboration et d’espérance : quand Jésus déclare que le salut est entré dans la maison de Zachée le publicain, il rétablit Zachée dans la communion avec Dieu et avec les siens (Lc 19).
Dire du bien c’est enfin un moyen d’évangéliser puisque c’est à l’amour que nous aurons les uns pour les autres que nous serons repérés comme des disciples. Lorsque nous disons du bien d’une personne, nous manifestons notre amour envers cette personne. À une époque très marquée par l’individualisme, nous avons besoin deparoles qui rétablissent la confiance et qui soient bienveillantes, qui témoignent de la bénédiction de Dieu pour chaque personne, nous avons besoin de recevoir de la bouche des autres, “la sagesse qui vient d’en haut, qui est d’abord pure, puis pacifique, bienveillante, conciliante, pleine de miséricorde et féconde en bons fruits, sans parti pris, sans hypocrisie.” (Jc 3,17)
Ce serait d’ailleurs magnifique si les chrétiens étaient connus dans le monde entier comme des gens qui pensent et qui disent du bien des autres.
Alors, puisque les vacances d’hiver commencent et que l’heure est à la détente, contribuons-y avec ce petit devoir de vacances : dire du bien des personnes que nous allons rencontrer.