25 Mar La rencontre du 19 mars : « L’écologie, une question spirituelle? »
La question écologique prolonge les questions de l’altérité, du sens et du bonheur, évoquées lors des précédentes séances. « Tout est lié » répète le pape François dans son encyclique Laudato Si. « On ne peut pas envisager une relation avec l’environnement isolée de la relation avec les autres personnes et avec Dieu. » Mais en quoi l’écologie concerne-t-elle notre foi chrétienne ?
Stéphane Lavignotte, pasteur et auteur de “L’écologie, un champ de bataille théologique” (textuel), explique l’histoire paradoxale de la relation de l’homme occidental aux réalités qui l’environnent.
A partir d’une mauvaise lecture des récits bibliques de la création, les chrétiens ont adopté un modèle naturaliste posant la supériorité des humains, séparés des autres êtres. Selon l’historien Lynn White, « En détruisant l’animisme païen, le christianisme a permis l’exploitation de la nature dans un climat d’indifférence à l’égard de la sensibilité des objets naturels ». Pour lui, le christianisme est la religion la plus anthropocentrique que le monde ait connue.
De fait, à partir de la Renaissance et surtout avec la révolution industrielle, la nature n’est plus devenue qu’une carrière à exploiter. Cette conception mécaniste, utilitaire, a perdu le sens spirituel de la relation aux réalités. Il n’est d’ailleurs pas indifférent d’observer que la modernité, dans sa fuite en avant de l’exploitation des ressources de la terre, est aussi le temps d’un abandon de la foi en Dieu créateur.
Celui-ci n’a pas demandé à l’homme de soumettre la création et de lui faire violence, mais de s’en faire le gardien. Nous sommes non pas les maîtres de la planète mais ses responsables. Et cette responsabilité, comme le souligne le pape François, s’étend aux plus pauvres qui sont aussi ceux qui souffrent le plus directement des dérèglements écologiques.
La question écologique est donc solidairement spirituelle et politique. Contre l’imaginaire productiviste, son souci destructeur de la consommation et du profit, quatre pistes de conversion sont proposées par Stéphane Lavignotte.
L’anti-idolâtre : Calvin enseignait le bon usage des biens terrestres en veillant à ce qu’ils ne nous détournent pas de Dieu. Il s’agit là d’écarter ce qui détruit et artificialise notre monde, ces nouvelles idoles que sont la technique, la consommation, la publicité, le profit, le marché, etc.
L’usagère : nous sommes les intendants des biens de Dieu, les « vicaires de la providence » disait encore Calvin.
La conviviale : elle insiste sur notre façon d’habiter le monde avec toutes les espèces non humaines. La grande figure en est François d’Assise qui invitait à une fraternité de tous les êtres vivants. Les récits de la Genèse « confessent, promettent et ordonnent un compagnonnage, sans lequel la création n’est pas bénédiction, mais chaos et meurtre du prochain », disait André Dumas.
La ruminante : elle consiste à retrouver le sens du sacré de la nature. Celle-ci est immense (Emerson, Thoreau), surprenante (Schweitzer), parfois contrariante (Ellul). Il faut la respecter et réapprendre à la contempler.