04 Nov La résurrection de la chair
Mercredi dernier nous avons prié pour nos défunts en méditant sur l’accomplissement de leur vie et voilà que l’évangile du dimanche nous invite à réfléchir sur la vie dans l’au-delà à partir d’une question piège des sadducéens sur les liens du mariage après la mort. A ceux qui imaginent que la vie dans l’au-delà serait une sorte de continuité de la vie sur terre, Jésus affirme le contraire : “ceux qui auront part à la résurrection ne prennent ni femme, ni mari car ils sont semblables aux anges et ne peuvent plus mourir”.
Cette affirmation de Jésus, si elle atteste la réalité de la résurrection face aux sadducéens qui la nient, peut malgré tout nous laisser assez perplexes : peut-on quand même espérer que les liens que nous créons ici-bas pourront persister lorsque nous serons auprès de Dieu ? Cette question touche aussi celle de nos relations avec les défunts : peut-on espérer que nos proches, qui sont auprès de Dieu, continuent à être en lien avec nous ? Ou bien faut-il accepter que la réalité du salut et du Règne de Dieu est tellement éloignée de tout ce que nous vivons, que nous n’en pouvons rien savoir ?
La résurrection du Christ nous donne un indice, même si elle est sans doute “unique”, puisqu’il s’agit d’une apparition du Christ en gloire dans notre monde présent. D’un côté, les disciples auxquels il est apparu ne peuvent pas le reconnaître d’emblée, ce qui laisse penser une discontinuité entre ce monde-ci et le monde de l’au-delà… mais, de l’autre côté, une fois qu’ils le reconnaissent, toute leur vie vécue avec lui prend sens à la lumière de cette apparition : Marie-Madeleine veut le retenir auprès d’elle, Thomas reconnaît de manière clair son sauveur et son Dieu, Pierre qui est confirmé dans sa mission de conduire l’Eglise, etc.
Ce lien entre notre vie terrestre et la vie dans l’au-delà est aussi attestée par la tradition judéo-chrétienne : la tradition juive de la prière pour les morts (2 M 2 12,43) et les traditions catholique et orthodoxe d’un double mouvement de prière pour les morts et d’intercession de ceux qui sont désormais auprès de Dieu en notre faveur.
Ceci est résumé dans la constitution du Concile Vatican II sur l’Eglise, Lumen Gentium, au § 49 :
“Donc, l’union de ceux qui sont encore en chemin, avec leurs frères qui se sont endormis dans la paix du Christ, ne connaît pas la moindre intermittence ; au contraire, selon la foi constante de l’Église, cette union est renforcée par l’échange des biens spirituels. Étant en effet liés plus intimement avec le Christ, les habitants du ciel contribuent à affermir plus solidement l’Église en sainteté, ils ajoutent à la grandeur du culte que l’Église rend à Dieu sur la terre et de multiples façons l’aident à se construire plus largement (cf. 1 Co 12, 12-27). Admis dans la patrie et présents au Seigneur (cf. 2 Co 5, 8), par lui, avec lui et en lui, ils ne cessent d’intercéder pour nous auprès du Père, offrant les mérites qu’ils ont acquis sur terre par l’unique Médiateur de Dieu et des hommes, le Christ Jésus (cf. 1 Tm 2, 5), servant le Seigneur en toutes choses et complétant en leur chair ce qui manque aux souffrances du Christ en faveur de son Corps qui est l’Église (cf. Col 1, 24). Ainsi leur sollicitude fraternelle est pour notre infirmité du plus grand secours”.
Nous proclamons bien dans le credo chaque dimanche notre foi en la “résurrection de la chair”, affirmant que nous ne serons pas de purs esprits, sans lien avec tout ce que nous avons vécu sur la terre, mais il faut également tenir que la réalité de notre “chair du ciel” sera bien différente de celle de la terre. Ce qui est semé périssable, sans honneur avec un corps humain sur la terre ressuscitera impérissable, dans la gloire avec un corps spirituel dit Saint Paul. (1 Co 15, 42-44).
Henri de la Hougue
Œuvre : La résurrection de Lazare, Jean Jouvenet, 1706, musée du Louvre