02 Juin La Trinité, une expérience vécue, célébrée et annoncée
L’autre jour, alors que je tenais la permanence de confession, deux musulmans d’une trentaine d’années entrent pour discuter de la foi chrétienne. “C’est quoi la Trinité pour vous ?” me demande l’un d’entre eux. Je lui réponds : “La Trinité, c’est le Dieu unique, tel que Jésus nous l’a fait découvrir : un Dieu qui nous aime comme un Père, que l’on découvre par son fils Jésus-Christ, grâce à l’Esprit Saint qui nous le rend présent dans notre vie quotidienne”. “Mais ce n’est pas logique”, me rétorquent-ils, “comment un Dieu unique, peut-être en trois personnes ?”
La logique est toujours liée à un contexte : la rigueur logique d’une démonstration mathématique n’est pas celle d’une argumentation philosophique, ni celle d’une exposition artistique. Ce n’est pas parce que nous n’arrivons pas à entrer dans une logique, que cette logique n’est pas valable pour d’autres.
De la même manière que la Trinité n’entre pas dans la logique musulmane, où l’on insiste constamment sur le fait qu’il ne peut pas y avoir de pluralité en Dieu, l’idée d’un Coran incréé, dans l’élaboration duquel Muhammad ne serait aucunement intervenu, n’est pas logique pour un chrétien pour lequel l’inspiration de Dieu laisse forcément une place à l’auteur humain.
La logique de la Trinité s’inscrit dans l’histoire de la foi judéo-chrétienne, puis dans la rationalité du monde grec où elle a su, au fil du temps, se faire une place centrale.
Cela n’est pas d’abord le fruit d’une argumentation intellectuelle, mais celui d’une expérience de vie, qui a progressivement été adoptée et professée par la population, avant d’être acceptée et officialisée par les autorités politiques de l’empire romain. L’élaboration rationnelle a ensuite permis de mettre des mots sur cette expérience fondamentale de vie : Dieu qui se rend présent à l’homme par le Christ grâce à l’Esprit Saint.
Cette expérience de vie s’est traduite, de manière plus importante encore, dans la liturgie. Un adage hérité d’un disciple de Saint Augustin (Prosper d’Aquitaine) dit : “lex orandi, lex credendi” (i.e. : “la loi qui est priée, c’est la loi qui est à croire”), pour dire que la liturgie reflète vraiment l’expérience de la foi d’un peuple.
Or, la Trinité, qui nous est conceptuellement parfois difficile à expliquer, nous l’expérimentons de manière assez simple dans notre vie de prière. C’est tout simplement de cela que nous avons à rendre compte lorsque l’on nous interroge sur la Trinité. Lorsque nous prions, nous appelons Dieu “Notre Père”, parce que, grâce au Christ nous avons conscience de faire désormais partie de la famille de Dieu. Et cette présence du Christ, que nous ne voyons pas, nous l’expérimentons par l’Esprit Saint.
C’est pour cela que la salutation liturgique de la messe commence par : “la grâce de Jésus-Christ notre Seigneur, l’amour de Dieu le Père, et la communion de l’Esprit Saint soit toujours avec vous !”, que chaque oraison se termine par la formule : “par Jésus-Christ notre Seigneur, lui qui règne avec toi et le Saint-Esprit, Dieu pour les siècles des siècles, Amen” et que la messe se conclut par : “Que le Dieu tout puissant vous bénisse, le Père, le Fils, et le Saint-Esprit”.
Henri de La Hougue
Rubens, la famille Gonzagues adorant la Sainte Trinité, 1604, Palais Ducal de Mantoue