10 Nov Document final du synode « Pour une Église synodale: communion, participation, Mission »
Au terme de 4 années de réflexion, dans les paroisses, les diocèses, les conférences épiscopales et deux sessions romaines, le synode des évêques « Pour une Eglise synodale: Communion, participation, Mission » a abouti à un document final. Contrairement aux synodes précédents, le pape a fait savoir qu’il n’y aura pas d’exhortation apostolique pour conclure la réflexion, mais que c’est le document final qui servira de guide pour la mise en œuvre de ce synode dans les différents continents.
Le document est désormais disponible en français:
En voici un résumé (ce n’est pas un résumé officiel, mais une simple aide que je vous propose pour aller à l’essentiel):
Père Henri de La Hougue
Introduction
1- Le cœur de synodalité. Appelés par l’Esprit à la conversion
Nous rencontrons 3 disciples au matin de Pâques: Marie Madeleine, Pierre et le disciple que Jésus aimait. Chacun cherche le Seigneur selon sa propre logique et c’est la complémentarité et la relation de confiance entre les trois qui va porter du fruit.
L’Église comme peuple de Dieu, sacrement de l’unité
L’identité du peuple de Dieu provient de son baptême au nom du Père, du Fils et du Saint Esprit.
L’Église, nourrie par le sacrement de son corps est constituée comme corps du Christ. L’Esprit l’anime et la construit, faisant de nous des pierres vivantes de l’édifice spirituel.
L’Église n’est pas une simple somme de baptisés mais le sujet communautaire et historique de la synodalité et de la mission, toujours en pèlerinage et en communion avec l’Église qui est au ciel. Les pauvres y ont une place toute spéciale. Non seulement par l’attention qu’on leur porte, mais aussi parce que l’Église a besoin d’apprendre à reconnaître en eux des agents de l’évangélisation.
La vocation et le service prophétique de l’Église consiste à rendre témoignage du plan de Dieu qui consiste à unir toute l’humanité à lui dans la liberté et dans la communion.
Les racines sacramentelles du peuple de Dieu
La dignité baptismale se manifeste à travers une grande variété de charismes, de vocations et de ministères. Nous pouvons compter sur le sens de la foi des fidèles, le sensus fidei qui est l’instance privilégiée de la vérité de l’Évangile. Ce sens de la foi n’est pas réductible à une simple opinion. Il cherche à atteindre le consensus des fidèles qui constitue un critère sûr pour déterminer le bien fondé d’une doctrine ou d’une pratique.
La démarche synodale s’enracine aussi dans une démarche oecuménique. Elle trouve toute sa pertinence dans la démarche catéchuménale et dans la célébration des sacrements.
Signification et dimensions de la synodalité
La compréhension du mot « synode » a varié dans l’église au fil des siècles, mais ces dernières années le sens de ce mot c’est précisé : un rassemblement qui unit les personnes pour dialoguer, discerner et décider et former ainsi une église qui représente la maison de Dieu et la famille de Dieu.
En particulier, la synodalité désigne trois aspects distinctes de la vie de l’église:
- C’est d’abord la vie de l’Église dans son ensemble, dans sa manière de cheminer ensemble avec le Christ dans l’Esprit Saint.
- Ce sont plus spécifiquement les structures et processus ecclésiaux qui exprime la synodalité de l’Église dans des démarches locales, régionales ou universelles.
- C’est le programme des événements synodaux à travers lesquels une Église régionale ou universelle, sous la présidence d’un évêque, discerne une question pastorale et prend des décisions pour l’évangélisation.
L’unité comme harmonie
L’Église, toujours vivante, se nourrit des relations interpersonnelles dans lesquelles se vit le commandement de l’amour du prochain. Chacun y trouve sa place avec une égale dignité et une vraie coresponsabilité pour cheminer ensemble dans la foi, selon les charisme de chacun. Les différentes cultures contribuent à créer cette unité ou la pluralité est vue d’abord comme un échange de dons.
Cette culture du dialogue, de la rencontre et de l’échange de dons doit aussi se vivre dans les relations avec les autres traditions religieuses, dans le but d’établir des relations d’amitié de paix, d’harmonie et de partager les valeurs morales et spirituels ainsi que l’expérience de l’esprit de vérité et d’amour.
La spiritualité synodale
La synodalité est d’abord une disposition spirituelle d’écoute de l’Esprit Saint à travers la Parole de Dieu, la contemplation, le silence et la conversation du cœur. Elle se traduit dans une manière de prier et de partager ensemble pour approfondir la foi: la “conversation dans l’Esprit”.
La synodalité comme prophétique pour la Parole d’aujourd’hui.
Pratiqué avec humilité, le style synodal rend l’Église capable d’être une voix prophétique pour le monde d’aujourd’hui, marqué par tant d’inégalités et d’autoritarismes.
2- Sur la barque, ensemble. La conversion des relations
Nouvelles relations
Le parcours synodal a permis à de nombreuses voix d’être entendues, hommes et femmes de toutes origines. La qualité des relations évangéliques dans la communauté est décisive pour le témoignage porté par le peuple de Dieu dans le monde: elle doit permettre à la grâce du Christ de s’exprimer, y compris par le biais des plus fragiles. La manière dont le Christ se met à l’écoute de ses interlocuteurs pour venir les rencontrer, quels qu’ils soient, doit être un modèle pour nous. La complémentarité des relations homme-femme en constitue un axe essentiel.
Dans la pluralité des contextes
Dans l’histoire, les relations entre les cultures ont souvent été déformées par des structures de péché qui les rendaient peu conformes à l’évangile et ont même entraîné des conflits et des guerres, divisant les chrétiens entre eux. Beaucoup de maux qui affligent le monde sont malheureusement présents au sein de l’Église, comme en témoigne la crise des abus (spirituels, économiques, institutionnels…) Dans ce contexte, il faut reconstruire les relations, prenant soin des victimes et mettant en place des mesures préventives pour reconstruire la confiance.
L’écoute de ceux qui souffrent d’exclusion et de marginalisation va renforcer dans la conscience de l’Église, la nécessité de travailler à réparer les relations blessées. L’oecuménisme est aussi une priorité pour lutter contre le scandale de la division.
Charismes, vocations et ministères pour la mission
La diversité des charisme et des vocations sont au service de l’unité du peuple de Dieu. Témoins du dynamisme et de la variété des dons de l’Esprit Saint, ces charismes enrichissent pour promouvoir la mission dans les différents lieux et cultures. Les femmes et les hommes ont la même dignité. Les femmes doivent être pleinement reconnues dans leurs charismes, dans leurs vocations et dans leurs rôles dans tous les domaines de la vie de l’Église. L’histoire montre qu’elles sont d’ailleurs très présentes dans les communautés chrétiennes et doivent aussi avoir leur place dans la recherche, dans des positions de responsabilité, tant au niveau diocésain que dans la curie romaine. La question de l’accession des femmes au diaconat reste ouverte, le discernement continue.
Les enfants et les jeunes doivent aussi avoir toute leur place dans l’église. Il y a vraiment une coresponsabilité de tous les baptisés pour la mission, y compris de ceux qui souffrent de handicaps, pour construire l’église avec tous les états de vie et tous les charismes.
Ministères ordonnés au service de l’harmonie
Tous les ministères ordonnés sont au service de cette harmonie
Le ministère d’évêque: en intégrant les dons de l’Esprit dans l’unité
La tâche de l’évêque est de présider une église locale comme principe visible de son unité et lien de communion avec toutes les Églises. Il accomplit cette mission en collaboration avec d’autres reconnaissant et discernant les dons de l’Esprit dans la communauté dont il a la charge, collaborant avec prêtres et diacres unis par le lien sacramentel de l’ordination. L’évêque est vraiment lié à son diocèse. Le diocèse doit être plus largement consulté pour sa nomination, il doit être ordonné dans le diocèse où il est accueilli, puis passer du temps avec les communautés lors des visites pastorales. L’évêque doit aussi être accompagné dans son ministère, notamment par l’archevêque métropolitain et les évêques voisins. Les fidèles doivent être conscients de la fragilité de toute personne, y compris de leur évêque et ne pas l’idéaliser.
Avec les évêques: prêtres et diacres
Dans ce même esprit synodal, les prêtres sont appelés à vivre leur ministère dans une esprit de proximité avec leur peuple. Ils s’enrichissent aussi de leurs frères prêtres, y compris des prêtres fidei donum d’autres cultures ou venant d’églises orientales. Ils ont aussi besoin d’être accompagnés notamment dans leurs premières années.
Les diacres sont ordonnés pour le ministère du service de la charité, qu’ils proclament aussi dans la liturgie.
Collaboration entre les ministres ordonnés dans une Église synodale.
Le travail en synodalité doit permettre une meilleure collaboration entre les différents ministres ordonnés et favoriser une co-responsabilité, évitant par là des situations d’isolement ou de surcharge des uns ou des autres.
Ensemble pour la mission
Il faut aussi tenir compte des ministres institués, comme les lecteurs et acolytes ou les catéchistes. Ils ont souvent de belles responsabilités dans les communautés locales où ils collaborent avec les autres personnes en responsabilité..
Il y a aussi les ministres extraordinaires, notamment les ministres extraordinaires de l’eucharistie qui guident parfois la prière du dimanche en l’absence des prêtres, administrent certains sacramentaux. Selon le droit canonique, l’évêque peut par exemple déléguer des laïcs comme assistants aux mariages.
On doit donner aux fidèles laïcs de vraies opportunités de participation à la vie des communautés, y compris en explorant de nouvelles formes de collaboration: leur présence dans les lieux de décision, dans des postes de responsabilités et de formation (y compris les séminaires) ou dans les institutions judiciaires doit être accrue.
Il a été suggéré que soit mis en place un “ministère d’écoute et d’accompagnement”, la réflexion à ce sujet se poursuit.
3- Jeter le filet: la conversion des processus
Dans la prière et le dialogue nous avons reconnu que le discernement ecclesial, le soin du processus de prise de décision, l’engagement à la responsabilité et l’évaluation de nos décisions sont des pratiques interconnectées. Lorsqu’elles sont placées sous la Parole de Dieu, elles nous montrent le chemin de la mission.
Discernement ecclesial pour la mission
Comme en Actes 15 où il est dit: “il a semblé bon à l’Esprit saint et à nous de…”, un discernement ecclesial à l’écoute de l’Esprit Saint doit aider à discerner les signes de la présence de Dieu pour faire avancer l’Église. Le discernement ecclesial n’est donc pas d’abord une technique, mais une pratique spirituelle enracinée dans la foi vivante, demandant une liberté intérieure, de l’humilité, de la prière, de la confiance mutuelle ou une ouverture aux nouveautés de la volonté de Dieu. Plus le nombre de personnes écoutées est grand, plus le discernement est bon. En fonction des lieux, on peut repérer plusieurs étapes:
- définir clairement l’objet du discernement et donner à tous les informations pour en comprendre les enjeux
- donner suffisamment de temps à la prière, à l’écoute de la Parole de Dieu à la réflexion sur la question
- une disposition intérieure à la liberté individuelle et en groupe pour le sujet concerné et une recherche du bien commun
- prendre le temps d’écouter attentivement et avec respect la voix de chacun
- chercher le plus large consensus, sans cacher les conflits et sans réduire la décision au plus petit commun dénominateur
- faire vérifier la formulation de la décision, de telle sorte que les participants puissent dire s’ils s’y reconnaissent ou pas.
Un discernement ecclesial suppose aussi un enracinement dans l’Écriture (avec des personnes compétentes), dans les pères de l’Église et dans la Traduction et les enseignements du Magistère. La diversité des approches est toujours une source de richesse.
La structure de la décision- mise en oeuvre des processus
Les pères de l’Église ont réfléchi sur la nature de la mission à partir de triple “rien sans”: “rien sans les évêques”, “rien sans sans le conseil des prêtres”, “rien sans le consentement du peuple”. Cette logique doit se poursuivre aujourd’hui pour promouvoir une coresponsabilité différenciée et permettre que se vive la période d’élaboration et de préparation au discernement, puis la période de prise de décision.
Dans une Église synodale, l’autorité de l’évêque, du collège épiscopal ou de l’évêque de Rome reste basée sur la structure hiérarchique établie par le Christ, elle est au service de l’unité et de la légitime diversité. Mais l’exercice de cette autorité n’est pas sans limite car elle ne doit jamais ignorer ce qui émerge du discernement fait lors des consultations préalables. Sans doute que l’expression du droit canonique “vote purement consultatif” doit être revue pour éliminer toute ambiguïté de telle sorte que toutes les personnes engagées dans le processus de discernement puissent assumer leur propre responsabilité en partageant clairement le fruit de leur discernement et en respectant la confidentialité des échanges. Lorsque l’autorité compétente a formulé la décision, en ayant respecté les processus de consultation, tous les baptisés doivent alors respecter et mettre en œuvre les décisions, même si cela ne correspond pas à ce qu’ils désiraient. Ils peuvent cependant participer honnêtement à la phase d’évaluation et même faire appel à une plus haute autorité si nécessaire.
Etre transparent, rendre compte et évaluer
La prise de décision ne conclut pas le processus de discernement. Elle doit être accompagnée d’un temps où on rend compte et où on évalue dans un esprit de transparence inspiré par des critères évangéliques. (cf. Pierre qui rend compte de son expérience chez les païens Ac 11, 2-3). Le processus synodal doit être marqué par la vérité, la loyauté, la clarté, l’honnêteté, l’intégrité, la consistance, le rejet de l’obscurité de l’hypocrisie ou de l’ambiguïté et l’absence de d’arrière-pensées. Cette attitude de transparence sauvegarde la confiance et la crédibilité de l’Église synodale et évite les risques de cléricalisme.
De manière similaire, il est important d’avoir des structures et des méthodes d’évaluation régulière de l’exercice du ministère. Les bonnes pratiques de la société doivent aussi être utilisées au sein de l’Église.
Cela inclut aussi les finances: conseils économiques qui fonctionnent, engagement du peuple de Dieu, en particulier de membres compétents, dans les organes financiers, préparation et publication de rapports financiers, si possible audités par quelqu’un d’extérieur.
Il sera nécessaire de faire un rapport annuel sur les activités de l’église locale incluant les initiatives de préservation des plus vulnérables, de promotion des laïcs dans les instances de décisions et de la proportion hommes-femmes.
Synodalité et instances participatives
De nombreuses instances participatives sont prévues par le droit canonique:
Pour le droit latin: synode diocésain, conseil presbytéral, conseil pastorale diocésain, conseil pastoral de paroisse, conseil diocésain ou paroissiale pour les affaires économiques
Pour le droit oriental: Assemblée de l’éparchie, assemblée de l’éparchie pour les affaires économiques, conseil presbytéral, Conseil pastoral de l’éparchie, conseils paroissiaux.
Ces instances contribuent aux prises de décisions et doivent aussi rendre des comptes. Encore faut-il qu’elles soient efficaces, qu’une attention soit réellement portée aux personnes qui les constituent, à leur représentativité (age, sexe, condition sociale…), aux mandats de ces personnes.
4- Une prise abondante: la conversions des liens
Fermement enracinés, mais pèlerins
Pour avancer, les chrétiens doivent être enracinés dans leur tradition locale, mais ouverts à la rencontre. L’action pastorale ne peut pas être limitée à la rencontre de ceux qui pensent comme nous. Le lieu d’enracinement ne peut plus être conçu de manière purement géographique mais tenir compte des réseaux de relations et de culture qui marquent effectivement la réalité territoriale d’aujourd’hui. La majorité des personnes dans le monde vivent dans les villes, souvent dans de grandes villes sans référence à une histoire ou une identité précise. La mission dans ces lieux demande une grande créativité pastorale avec de nouvelles formes d’attentions pastorales. Les réfugiés et les migrants sont très présents dans ces villes et dans nos communautés, ce qui nécessite aussi une attention pastorale particulière.
La culture numérique, particulièrement développée chez les jeunes, change profondément le rapport au temps et à l’espace, influençant leurs activités quotidiennes, leurs communications, leurs relations interpersonnelles et même leur foi. Cette culture n’empêche pas l’isolement, les manipulations politiques et les polarisations. Nous devons encourager les chrétiens qui s’investissent dans le monde numérique pour les aider à voir comment ils créent des liens d’appartenance en favorisant la rencontre et le dialogue.
Cette nouvelle compréhension du lieu et de l’espace nous conduit à réfléchir à notre “chez nous”, pour que ce ne soit pas un espace barricadé mais ouvert à l’hospitalité:
- Cela doit se vivre au niveau de notre église locale, qui doit être en relation avec les autres,
- Cela se vit également au niveau paroissial, où chacun doit se sentir accueilli dans sa diversité et accompagné dans sa démarche de foi. La paroisse n’est pas centrée sur elle-même, mais orientée vers la mission encourageant les paroissiens dans leur engagements professionnels, sociaux, culturels ou politiques.
- Cela se vit dans les instituts de vie consacrée et sociétés de vie apostolique, dans les mouvements et les communautés nouvelles
L’échange des dons
La fait de marcher ensemble à la suite du Christ dans la diversité des charismes et des ministères, tout en gardant l’attention à vivre un échange de dons avec les autres Églises, est un signe effectif de l’amour et de la miséricorde de Dieu, portés par l’Esprit donné par le Christ.
L’échange de dons implique tous les aspects de l’Église. Les relations entre l’Église d’Orient et l’Église d’Occident en sont un exemple inspirant et paradigmatique, mais cela inclut aussi les relations internationales, le partage des ressources dans un esprit de solidarité, sans paternalisme ou subordination avec un respect de la diversité et la promotion d’une saine réciprocité.
Le lien de l’unité: conférences épiscopales et assemblées ecclésiales
Cet échange de dons invite à combiner l’attention aux liens qui forment l’unité de l’Église et la reconnaissance du contexte particulier de chaque Église locale. Les conférences épiscopales expriment et mettent en œuvre la collégialité des évêques pour favoriser la communion entre les Églises et répondre plus efficacement aux besoins de la vie pastorale.
Tenant compte de cette réalité, il est nécessaire de réajuster le statut des conférences épiscopales, de préciser leurs domaines de compétence, voir les réformes nécessaires (profiter des conférences ad limina pour cela), s’assurer que tous les diocèses y sont représentés, et spécifier l’autorité des décisions prises en conférences sur les évêques des diocèses qui la compose.
Le statut des assemblées continentales, qui émergent depuis 2023, doit aussi faire le fruit d’un travail canonique pour leur permettre de porter du fruit.
La synodalité permet concrètement l’engagement de tous (le saint peuple de Dieu) et le ministère de certains (le collège des évêques) dans le processus de prise de décision concernant la mission de l’Église.
Pour réaliser une décentralisation salutaire et une inculturation effective de la foi, il faut reconnaître non seulement le rôle des conférences épiscopales, mais aussi réévaluer l’institution de conseils particuliers, Provinciaux ou Généraux.
Le service de l’évêque de Rome
Le processus synodal a aussi revisité la manière dont l’évêque de Rome exerce son ministère. La synodalité rend possibles les aspects communautaires (“tous”) collégiaux “quelques-uns” et personnels (“une”) des Églises locales et de l’Église entière. Le ministère pétrinien joue un rôle central dans cette dynamique synodale. L’évêque de Rome est à la fois fondation de l’unité de l’Église et garant de sa synodalité. Avec le collège des évêques, il est le pasteur de l’Église tout entière et il promeut la synodalité dans toutes les églises locales.
Pour favoriser ces relations, l’assemblée synodale propose d’établir un conseil des Patriarches, archevêques majeures et métropolitains des Églises Orientales catholique, qui serait une expression de la synodalité et un instrument pour promouvoir la communion. Cela a d’autant plus de sens que de nombreux chrétiens de rite oriental émigrent vers des zones de rite latin et risquent de perdre leur identité.
La décentralisation consiste aussi à réévaluer, théologiquement et canoniquement, ce qui relève du ministère du pape et ce qui relève du ministère des évêques dans les décisions à prendre, dans la ligne du Motu Proprio du pape François Competentias quasdam decernere, (février 2022) et de la constitution apostolique Praedicate Evangélicum de mars 2022 qui réorganise la Curie.
Tout en préservant la nature épiscopale d’un synode des évêques, le synode sur la synodalité a montré comment la participation d’autres membres du peuple de Dieu (prêtres diacres, laïcs, hommes femmes, membres d’autres églises…) donne au ministère d’évêque la forme de ministère que son autorité est amené à prendre: un ministère relationnel et synodal.
5- Je vous envoie: former un peuple pour être disciples missionnaires
Au soir de sa résurrection, Jésus a donné à ses disciples le don salvifique de sa paix et a leur a partagé sa mission. Le peuple de Dieu doit donc se former pour témoigner de la joie de l’évangile et grandir dans la pratique de la synodalité: d’abord en la liberté des fils et des filles de Dieu à la suite de Jésus-Christ, en le contemplant dans la prière et en le reconnaissant parmi les pauvres.
La formation des disciples missionnaires commence avec l’initiation chrétienne, grâce à la rencontre de personnes, groupes et petites communautés; mais cette formation n’est pas terminée à la fin de l’initiation, elle demande une conversion continue, pour grandir et atteindre la plénitude du Christ (Eph 4, 13) et être ouverts aux dons de l’Esprit pour un témoignage vivant et joyeux de la foi. L’eucharistie dominicale tient une place centrale dans cette formation, mais la formation doit être plus largement une formation intégrale (engageant toute la personne: dimension intellectuelle, affective, relationnelle et spirituelle) et continue. Beaucoup de choses existent déjà dans les communautés locales pour répondre à ces besoins et il est important de s’y engager. Dans l’Église, personne ne peut se contenter uniquement de recevoir des formations: tous doivent être actifs et avoir des choses à apporter aux autres.
Les lieux de formation comme la catéchèse, les écoles et universités catholiques doivent contribuer à promouvoir une alternative face aux modèles dominants souvent marqués par l’individualisme et l’esprit de compétition. La formation synodale peut vraiment y contribuer. La formation des candidats au ministère doit aussi être entreprise selon une voie synodale, marquée par une immersion dans la vie quotidienne des communautés et une présence signifiante de femmes et une insistance sur la collaboration avec tous dans l’Église. La ratio Fundamentalis Institutionis Sacerdotalis devra sans doute être révisée pour tenir compte de cela.
D’autres lieux de formation doivent être renforcés: formation à la culture numérique, formation à une culture de prévention des abus et des personnes vulnérables, et d’une manière plus générale les thèmes de la doctrine sociale de l’Église: l’engagement pour la paix et la justice, l’attention à notre “maison commune”, le dialogue interreligieux et interculturel…
Conclusion: Un festin pour tous les peuples.
La pêche miraculeuse se conclut par un festin, où le ressuscité convie ses disciples à un repas qu’il a lui-même préparé. c’est le signe que le banquet eschatologique a déjà commencé. Bien qu’il trouvera son accomplissement au ciel, il est déjà proposé à tous. L’Église à la mission d’apporter cette nouvelle à tous dans un monde changeant, en particulier aux plus pauvres, à ceux qui sont sans espoir, qui manquent d’amour, qui ne croient pas en Dieu et ne se reconnaissent dans aucune religion. La synodalité de l’Église est le moyen privilégié pour que chacun y trouve sa place, une prophétie sociale, qui peut inspirer de nouveaux chemin dans la sphère politique et économique et permettre une collaboration dans l’amitié et la paix.