10 Jan Les indulgences
Parmi les 6 démarches que nous propose l’Église pour vivre l’année sainte, il y a celle de demander et de recevoir une indulgence plénière.
Qu’est-ce que cela signifie ? Pour comprendre cette notion, voici quelques éclairages sur les termes utilisés dans la tradition médiévale qui gardent aujourd’hui une signification technique sur le plan canonique, même s’ils sont moins utilisés dans le langage pastoral :
Le péché est une pensée, une parole, une action ou une omission qui nous éloigne de Dieu (péché dit “véniel”) ou qui crée une rupture grave dans la relation avec lui (péché dit “mortel”). Il peut concerner directement notre relation à Dieu (par exemple un manque de prière) ; il peut être lié à une faute commise envers une autre personne (par exemple faire du mal ou dire du mal d’une personne) ou commise envers nous-même (par exemple passer ses nuits sur son téléphone au lieu de dormir).
Le péché entraîne le plus souvent 3 conséquences :
- si le péché est lié à une faute commise envers une autre personne, il entraîne pour cette dernière nécessairement des séquelles physiques ou psychologiques. Pour compenser cela le pécheur repenti doit faire tout ce qui est possible pour se réconcilier avec elle, ou lui rendre justice avec les moyens humains à sa disposition.
- puisqu’il est une “offense” faite à Dieu, le péché entraîne un éloignement ou une rupture dans la relation avec Dieu qui a besoin d’être réconciliée pour éviter que la séparation devienne définitive et prive le pécheur de pouvoir profiter un jour du bonheur de la joie éternelle. Dans le vocabulaire canonique de l’Église, on nomme cette privation définitive : la “peine éternelle”.
- mais le péché entraîne aussi des conséquences néfastes pour celui qui le commet : un amoindrissement de ses capacités à choisir le bien ou à éviter le mal, à cause de la mauvaise habitude qu’engendre ce péché. Par exemple, une personne qui perd l’habitude de prier va avoir du mal à s’y remettre, une personne qui prend l’habitude de se mettre en valeur aux dépens des autres, aura de plus en plus de mal à se décentrer d’elle-même… Le péché entraîne donc une privation partielle de notre liberté à orienter toute notre vie vers le Christ qu’on appelle dans le vocabulaire canonique, la “peine temporelle” par opposition à la “peine éternelle”.
En allant se confesser, on reçoit le pardon de nos péchés, c’est-à-dire que nous sommes pleinement rétablis dans la relation avec Dieu, sans aucune contre-partie. D’un point de vue canonique, nous ne sommes donc plus sous le coup de la “peine éternelle”, puisque nous avons retrouvé la relation avec Dieu.
Mais les conséquences de nos péchés restent, tant celles que nous avons faites aux autres que les peines temporelles provoquées par nos péchés.
Pour progresser dans la vie spirituelle, nous devons nous purifier de ces “peines temporelles”, en luttant contre les tentations et en prenant de bonnes habitudes qui nous aident à grandir dans notre liberté à faire le bien.
Pour nous y aider, dans les années jubilaires ou à certaines grandes occasions, l’Église propose de vivre, dans la longue tradition juive des années jubilaires où les dettes étaient remises, une démarche spécifique pour nous libérer de ces peines temporelles et elle délivre une sorte d’attestation de libération de ces peines, appelée indulgence : libération partielle pour une peine liée à un péché précis (indulgence partielle) ou une libération pour l’ensemble des peines provoquées par nos péchés (indulgence plénière).
Pour ce faire, elle nous propose de nous rendre dans un des lieux de pèlerinages prévus, de franchir la porte sainte et de recevoir le sacrement de la réconciliation. Nous recevrons alors cette indulgence plénière.
On se souvient que Luther s’était opposé fermement à marchandisation des indulgences et on peut le comprendre lorsque l’on regarde les dérives auxquelles le commerce des indulgences avait prêté le flanc à son époque. On comprend aussi que cette pratique des indulgences est toujours délicate à manier et qu’une démarche qui ne serait pas authentiquement vécue dans un profond désir de pénitence et de réconciliation n’aurait pas une grande valeur spirituelle.
Mais pour ceux qui le souhaitent, cette année jubilaire est vraiment l’occasion de vivre cette expérience plus complète de la miséricorde, alors profitons-en.
Henri de La Hougue