02 Mar Comment savoir à quel point de conversion Dieu nous appelle ?
Au peuple d’Israël, qui demande au prophète Isaïe pourquoi Dieu ne semble pas répondre à ses efforts de pénitence et de jeûne, ce dernier les invite à discerner vraiment là où Dieu les attend : ils ont fait des efforts extérieurs, mais ils n’ont pas changé fondamentalement d’attitude vis-à-vis des autres : violence, injustice, ignorance des plus pauvres (Is 58, 1-9). Et de fait, si on met en place des efforts d’ascèse sans avoir pris le temps d’en discerner le but, nous risquons de passer à côté de l’essentiel, de nous fatiguer pour peu de choses, et finalement de laisser tomber assez rapidement.
En ce début de Carême, comment recentrer nos efforts sur ce que Dieu attend vraiment de nous, personnellement, familialement et collectivement aujourd’hui ? Comment discerner les points de conversion prioritaires dans nos vies ?
Dieu nous parle habituellement de plusieurs manières :
– Il nous parle d’abord « positivement » lorsque nous essayons d’actualiser la bible dans nos vies, en laissant le Christ nous parler tandis que nous méditons le passage de la bible que nous venons de lire ou d’écouter. Une parole peut alors résonner particulièrement dans nos cœurs et nous inviter à approfondir un point particulier de notre vie, à entreprendre une démarche de réconciliation vis-à-vis d’une autre personne, à partager davantage…
– Il nous parle aussi « positivement » lorsque nous demandons à l’Esprit Saint de nous guider dans nos choix quotidiens et que nous prenons le temps de confier vraiment à Dieu les différents choix qui s’offrent à nous, surtout si nous vivons ce discernement à plusieurs. En relisant nos journées le soir à la lumière du Seigneur, nous pourrons repérer cette présence du Seigneur qui nous a guidés.
– Il nous parle encore « positivement » à travers la rencontre des autres. Un jour j’étais invité à dîner dans une famille avec plusieurs personnes et le maître de maison n’a jamais cessé de mettre en valeur ses convives, de manière très encourageante, sans flatteries et sans jamais parler de lui-même. On sentait chez lui une vraie qualité d’attention et une vraie bonté. Sur le chemin du retour, j’ai senti que le Seigneur me disait : « c’est ça que j’attends de toi dans ton Ministère de prêtre ! ».
– Il nous parle toujours « positivement » lorsqu’il nous redit, dans la célébration des sacrements combien il nous aime et combien il est présent à nos côtés. En ce temps de carême, le sacrement de la réconciliation est particulièrement le bon lieu pour « faire le point » avec Dieu et recevoir la joie du pardon.
– Il nous parle aussi « négativement » par les points de conversion que nous pouvons repérer dans notre vie quotidienne : agacements, stress, colères, impuretés, impatiences, manques d’attention, perte de motivation dans les études ou le travail, etc. Tous ces points, sur lesquels nous n’avons pas tellement de prise immédiate, sont en fait des petits symptômes d’une vie pas suffisamment ajustée à Dieu et aux autres … et donc, les symptômes d’un axe de conversion plus profond qu’il s’agit de discerner.
Le but est de ne pas nous arrêter aux symptômes, ni de vouloir en rechercher les causes plus ou moins légitimes (fatigue, lassitude…) mais de rechercher l’axe de conversion auquel le Seigneur nous invite pour mettre en œuvre son royaume : Des manifestations d’impatience régulières avec notre conjoint peuvent être, par exemple, une invitation à nous replonger dans l’engagement fondamental du mariage : « je me donne à toi et je te reçois pour t’aimer tous les jours de notre vie ». Le fait de vivre chaque événement avec stress peut être une invitation à laisser davantage le Christ habiter chaque instant de notre vie. Le fait de ne plus être motivé dans ses études peut être une invitation à réfléchir plus profondément à notre projet d’avenir avec le Seigneur. Le fait d’être trop consommateur de séries télévisées peut être une invitation à laisser plus de dialogue dans le foyer…
Une fois qu’on a repéré les axes de conversion qui se cachent derrière les symptômes, nous pouvons choisir celui qui nous semble prioritaire aux yeux de Dieu et axer nos efforts de carême dessus. Cela nous aidera à avoir des résolutions plus ciblées et plus réalistes. Alors notre jeûne, notre prière et nos partages auront une portée plus grande et notre temps du carême aura été un beau temps de progression spirituelle.
Père Henri de la Hougue