04 Fév Les doutes qui font avancer et ceux qui enferment
(Homélie du 4ème dimanche de l’année C)
Quand Jésus prend la parole
Jésus vient de faire la lecture du livre d’Isaïe à la synagogue de Nazareth annonçant l’arrivée d’un Messie et l’avènement d’une année jubilaire. A la fin, il retourne à sa place, mais c’est le silence : tous ont les yeux fixés sur lui. Ils ont entendu parler des premiers miracles qu’il a accomplis à Capharnaüm… Et ils observent Jésus.
Voilà que Jésus prend la parole et dit: “Aujourd’hui s’accomplit le passage que vous venez d’entendre”.
La foule est à la fois dans l’émerveillement et dans l’étonnement: « Comment Jésus, que l’on connaît bien, peut-il être aujourd’hui le messie annoncé par Isaïe? »
Il y avait en effet à cette époque une forte attente messianique: beaucoup attendaient pour imminente l’arrivée d’un nouvel envoyé de Dieu, de la trempe de Moïse ou d’Elie,… d’un homme envoyé par Dieu, un homme sur lequel reposerait, comme l’a annoncé Isaïe, l’Esprit du Seigneur et qui serait capable de chasser l’occupant romain, de redonner l’autonomie au peuple d’Israël et de restaurer sa grandeur.
De l’étonnement légitime au refus
Il faut reconnaître que leur étonnement est bien compréhensible: “Comment un fils de charpentier peut devenir le Messie?” “Comment Jésus, sans doute connu plus pour sa douceur et sa gentillesse que pour ses démonstrations de force et ses prises de position politique, pourrait être le Messie politique et militaire attendu?”…
Mais après l’étonnement, le refus s’installe chez plusieurs: « non vraiment, du fils de Joseph le charpentier, ne peut pas venir le Messie! Il n’a aucune formation religieuse et il prétend accomplir les Ecritures! »
Ce refus les enferme dans leur certitude et ils refusent même de chercher à comprendre comment Jésus a opéré des miracles à Capharnaüm et leur signification dans le plan de Dieu.
De Jésus, ils attendent simplement qu’il puisse faire chez lui les miracles, des guérisons qu’il a fait ailleurs, mais ne veulent pas reconnaître en lui le Messie. Ils veulent combler leurs besoins matériels, mais ne veulent pas chercher plus loin la signification de ces signes pour leur propre cheminement.
Ils veulent bien recevoir la Parole de Dieu, mais dans une certaine mesure, selon ce qui les arrange.
Du coup Jésus les renvoie à leur responsabilité de peuple choisi par Dieu: Dieu veut que tous les hommes soient sauvés et le rôle du peuple d’Israël c’est d’accueillir le Messie pour en être le signe visible pour l’ensemble des peuples. C’est le sens de leur élection: s’ils refusent le Christ, cette responsabilité de peuple élu passera à d’autres peuples, comme cela s’est déjà fait à l’époque d’Elie et Elisée quand les rois d’Israël refusaient leur message.
De cet évangile je vous propose trois points de réflexions:
Il y a des doutes qui font avancer et des doutes qui enferment.
- Les doutes qui font avancer sont ceux qui posent des questions légitimes sur la manière dont Dieu agit, alors que celle-ci n’est pas évidente puisque nous sommes confrontés au mal sous toutes ses formes. C’est ainsi que Marie demande à l’ange au moment de l’annonciation “comment cela va-t-il se faire?, ou que les apôtres interrogent Jésus “pourquoi cet homme est-il né aveugle?” Ces questionnements qui naissent de nos doutes sont bons car Dieu nous invite à utiliser notre intelligence et non pas à le suivre béatement.
- Mais il y a aussi des doutes qui enferment, dans le sens où ils sont des refus d’aller plus loin: “tant que tout ne sera pas clair pour moi, je n’avancerai pas”, “tant que je n’aurai pas de preuve je n’irai pas plus loin”. C’est ainsi que certaines personnes se privent de bien belles aventures quand ils refusent de s’engager dans leur relations avec des personnes ou avec le Christ. Si leur renoncement va jusqu’à un refus de voir les signes qui sont plus évidents, cela devient un enfermement qui les rendra malheureux.
Qu’attendons-nous vraiment de Jésus dans notre vie?
- Qu’il fasse en sorte que nous soyons bien? Qu’ils viennent résoudre tous nos problèmes?
- Ou bien qu’il nous aide à faire avancer son royaume et pour cela à reconnaître les signes d’encouragement qu’il nous donne, sa présence à nos côtés.
C’est toujours intéressant de relire nos temps de prière pour nous demander au fond si cette prière est aussi un temps de remerciement, un temps donné gratuitement par amour, au sens où nous invite à le faire la 2ème lecture, un temps de prière pour les autres, ou bien si c’est uniquement un temps de réclamations pour nous-mêmes.
Etre signe du salut pour les non-chrétiens
De la même manière que le peuple d’Israël avait été choisi pour accueillir le Messie, aujourd’hui c’est à l’Eglise d’être signe du salut que Dieu veut donner au monde entier. Elle est, comme dit le Concile Vatican II “le signe et le moyen de l’union intime avec Dieu et de l’unité de tout le genre humain”. Comment sommes-nous signes, pour les autres, de cette possibilité inouïe que Dieu nous donne d’être unis intimement avec lui? Comment autour de nous, avec ceux qui ne partagent pas la foi chrétienne pouvons nous témoigner, implicitement ou explicitement de cette union avec le Christ qui donne sens à notre vie? Comment sommes-nous témoins de la charité qui devrait nous habiter? Comment notre témoignage est-il recevable pour les autres? Sommes nous témoins d’une ouverture à tous ou d’une fermeture à tous ceux qui ne pensent pas comme nous?
Pour beaucoup de gens les cathos sont des gens un peu coincés, qui refusent le mariage pour tous et l’avortement, mais c’est vraiment dommage que les gens ne se disent pas: les cathos, ce sont des gens qui sont ouverts à tous, avec eux, on se sent vraiment accueillis… Puis ils ont une force intérieure qui les aide à penser aux autres avant de penser à eux-mêmes. Les cathos, ils donnent envie de prier et d’être croyants.
Demandons au Seigneur cette grâce. Amen!