19 Jan L’Unité des chrétiens
Chaque année, à l’occasion de la fête de la conversion de saint Paul, le 25 janvier, l’Église nous invite à prier pour l’unité entre les différentes Églises chrétiennes : catholique, protestante et orthodoxe.
Les progrès en matière d’œcuménisme ont été considérables depuis 50 ans, nous permettant de nous rencontrer sans crainte, de prier ensemble, de nous enrichir de nos recherches mutuelles en théologie et en exégèse…
Si les générations plus anciennes, qui ont été témoins de ces progrès, perçoivent l’intérêt de maintenir vivantes ces relations œcuméniques, cet intérêt est plus difficile à percevoir pour les jeunes générations qui, globalement, profitent de ces bonnes relations établies par les générations précédentes, mais voient dans l’œcuménisme un risque de dilution de leur foi catholique dans un monde déjà très indifférent, voire hostile à la foi chrétienne.
Dans cette quête de repères, la question œcuménique ne leur apparaît pas comme une priorité. La priorité est plutôt de bien intégrer les éléments et les rites de la foi catholique sur lesquels ils peuvent s’appuyer pour vivre leur foi dans leur vie quotidienne.
Aussi me semble-t-il important de rappeler qu’une démarche œcuménique bien vécue, loin d’entraîner un risque de dilution de notre foi, peut permettre de nous enraciner dans notre propre tradition et de progresser dans notre propre foi.
Pour que les relations œcuméniques soient bien vécues, il faut écarter quatre attitudes : deux attitudes relativistes et deux attitudes excluantes :
- la 1ère attitude relativiste consisterait à chercher à être conciliants avec les autres confessions chrétiennes, sans chercher à comprendre les différences et sans chercher où est la vérité. Cette attitude pourrait être résumée en une phrase : “Toutes les confessions chrétiennes se valent”.
- la seconde chercherait à unifier les différentes confessions à partir d’un plus petit dénominateur commun : “ce qui est essentiel c’est ce sur quoi nous sommes tous d’accord, le reste n’est pas important”.
Ces deux formes de pensée, qui proviennent souvent d’un désir légitime d’éviter les conflits entre nous, ne permettent pas un vrai travail œcuménique, car elles diluent la foi dans des compromis qui ne respectent pas nos traditions respectives. Pour pouvoir s’engager dans de saines relations œcuméniques, il faut être bien ancré dans sa propre tradition.
A l’opposé de ces deux attitudes relativistes, il faut aussi éviter deux attitudes excluantes :
- la première est marquée par une idéologie intégriste : elle oppose une Église qui détiendrait à elle seule toute la vérité, aux autres Églises qui seraient dans l’erreur. Toute forme de dialogue œcuménique serait alors vue comme une atteinte à l’intégrité de la foi.
- la seconde n’est pas liée à une position idéologique, mais à une forme de communication exclusive sur les réseaux sociaux, où des influenceurs imposent, à ceux qui les suivent, certaines formes de pratique ou de pensée, qu’ils présentent comme authentiques ou traditionnelles mais qui les ferment à tout dialogue avec ceux qui ne pensent pas comme eux.
Même si ces formes sont rassurantes pour ceux qui les suivent, elles ne respectent pas le travail de l’Esprit Saint qui agit bien au-delà d’une Église particulière, dans une diversité de dons et de charismes. “Nous ne possédons pas la vérité, disait Benoît XVI, c’est la Vérité qui nous possède, la Vérité c’est le Christ qui nous tient par la main, tandis que nous allons à la rencontre des autres”.
Travailler à l’unité entre chrétiens exige donc une bonne connaissance de sa propre foi, un discernement et une attitude ouverte à l’Esprit Saint. Voici 8 attitudes qui peuvent nous y aider :
- approfondir les richesses de notre propre tradition pour être capables d’en rendre compte auprès des autres de manière cohérente et crédible ;
- être toujours dans une attitude de chercheurs de Dieu, de disciples du Christ, soucieux de nous enrichir dans la rencontre avec les autres chrétiens ;
- laisser une place importante à la méditation de la Parole de Dieu dans nos échanges ;
- favoriser les rencontres avec d’autres confessions chrétiennes pour que nous puissions dépasser les appréhensions culturelles et même nous enrichir de nos divergences de sensibilités ;
- accepter d’être à l’écoute des logiques et des positions de chaque communauté, même si on ne les partage pas ;
- ne jamais renier ce qui nous semble essentiel, tout en n’abandonnant jamais le désir de pouvoir progresser dans l’unité avec les autres Églises, notamment sur les points qui semblent difficiles ;
- accepter de pouvoir cheminer ensemble là où c’est possible, sans nous laisser accaparer par des blocages sur d’autres points. Par exemple, ce n’est pas parce que nous n’avons pas le même culte des saints, que nous ne pouvons pas participer ensemble à un groupe biblique ;
- si nous avons la chance de connaître des couples mixtes (catholique-protestant, protestant-orthodoxe ou catholique-orthodoxes) qui vivent cette unité au quotidien, recevoir leur expérience comme une invitation à progresser dans l’unité.
C’est en vivant dans cette double attitude d’enracinement et d’ouverture que l’œcuménisme viendra naturellement enrichir notre foi.
Père Henri de La Hougue