22 Mar La Passion du Christ
Cette semaine sainte sera marquée par la lecture de la passion que nous entendrons deux fois, le dimanche des Rameaux et le Vendredi saint.
Le mot passion signifie étymologiquement “souffrance”, sens que l’on retrouve dans l’expression ‘avoir de la compassion’, c’est-à-dire, être touché par la souffrance d’une personne. Mais dans le langage courant, le mot passion signifie le plus souvent “un amour intense”. Et, au fond, les deux sens se conjuguent bien lorsque l’on parle de la Passion du Christ : le Christ donne sa vie, par amour intense pour l’humanité, et cela à travers la grande souffrance du châtiment qu’il subit : la torture et la crucifixion.
Cependant, si Jésus vit sa Passion par amour et avec amour, il n’a aucun plaisir à le faire et il vit au contraire avec une grande douleur la souffrance physique infligée par les supplices et la souffrance morale liée d’une part à l’abandon de tous ses compagnons, d’autre part à l’échec apparent de sa mission et de sa prédication.
Ces souffrances n’ont aucune valeur salvifique par elles-mêmes. Elles font partie, comme toute torture et toute condamnation à mort, des pires souffrances que l’humanité, dans son péché, est capable d’infliger à ses membres. Elles sont déshumanisantes et représentent donc le contraire de ce que Jésus a voulu apporter à l’humanité : sa plénitude. Alors en quoi cette Passion du Christ peut-elle nous apporter le salut ? Elle nous apporte le salut :
- parce qu’elle manifeste la parfaite fidélité et la grande solidarité du Christ pour l’humanité. Le Christ, constatant le refus définitif des autorités religieuses de le recevoir aurait pu fuir, mais il décide au contraire de rester solidaire jusqu’au bout.
S’il avait fui, sa venue sur terre n’aurait servi à rien, le péché de l’humanité et son refus de salut auraient été alors définitivement entérinés par Dieu qui aurait dû renoncer à sauver toute l’humanité et se contenter d’accueillir quelques saints exceptionnels ;
- or le choix de Dieu était bien de sauver toute l’humanité et la seule manière de le faire était de manifester cette solidarité jusqu’au bout avec tous, y compris les pécheurs et ceux qui le rejettent ouvertement, et de manifester, par sa résurrection, que le péché et la mort n’auraient pas le dernier mot ;
- c’est donc la résurrection qui vient donner tout son sens à la Passion. Le Christ meurt par solidarité avec nous, mais en vue de nous montrer le chemin vers la vie éternelle. Grâce à la résurrection, la Passion devient un chemin de salut : l’échec apparent de Dieu devient la victoire du Christ sur le péché ; les ténèbres laissent place à la lumière.
Parce qu’elle est une œuvre d’amour vécue pour nous et qu’elle nous ouvre à la vie éternelle, la Passion du Christ devient cruciale pour notre propre histoire. Il meurt par solidarité avec ce peuple au milieu duquel il a vécu en Palestine il y a 2000 ans, mais il meurt aussi en solidarité avec nos propres vies d’aujourd’hui. Comme le dit Isaïe à propos du serviteur souffrant : “En fait, c’étaient nos souffrances qu’il portait, nos douleurs dont il était chargé” (53,4). C’est bien par amour pour chacun de nous qu’il a donné sa vie. « Si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il reste seul ; s’il meurt il porte beaucoup de fruit » (Jn 12, 24).
Père Henri de La Hougue
Jérusalem, Jean-Léon Gérôme, 1867, Huile sur toile, Musée d’Orsay